ABRUPTO

20.6.06


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Enfin quelle apparence de pouvoir remplir tous les goûts si différents des hommes par un seul ouvrage de morale?

Les uns cherchent des définitions, des divisions, des tables, et de la méthode: ils veulent qu'on leur explique ce que c'est que la vertu en général, et cette vertu en particulier; quelle différence se trouve entre la valeur, la force et la magnanimité; les vices extrêmes par le défaut ou par l'excès entre lesquels chaque vertu se trouve placée, et duquel de ces deux extrêmes elle emprunte davantage; toute autre doctrine ne leur plaît pas. Les autres, contents que l'on réduise les moeurs aux passions et que l'on explique celles-ci par le mouvement du sang, par celui des fibres et des artères, quittent un auteur de tout le reste.


Il s'en trouve d'un troisième ordre qui, persuadés que toute doctrine des moeurs doit tendre à les réformer, à discerner les bonnes d'avec les mauvaises, et à démêler dans les hommes ce qu'il y a de vain, de faible et de ridicule, d'avec ce qu'ils peuvent avoir de bon, de sain et de louable, se plaisent infiniment dans la lecture des livres qui, supposant les principes physiques et moraux rebattus par les anciens et les modernes, se jettent d'abord dans leur application aux moeurs du temps, corrigent les hommes les uns par les autres, par ces images de choses qui leur sont si familières, et dont néanmoins ils ne s'avisaient pas de tirer leur instruction.

Tel est le traité des Caractères des moeurs que nous a laissé Théophraste.

(La Bruyère, Les caractères ou Les moeurs de ce siècle )

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Bom dia!

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© José Pacheco Pereira
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